Les « palais » des Corses d’Amérique
Elles étonnent dans le paysage, ces grandes bâtisses rectangulaires, construites au XIXe siècle ou au tout début du XXe siècle. Généralement coiffées d’un toit à quatre pentes en lauzes du pays elles sont placées sur une hauteur ou dans un endroit privilégié, souvent entourées d’un jardin arboré avec des palmiers, et d’autres arbres majestueux. Ces « palais » sont d’abord des monuments qui célèbrent la réussite sociale. Leurs premiers propriétaires sont des Capcorsins audacieux partis faire fortune aux Amériques ou ailleurs et revenus construire, chez eux, maison et tombeau.
Au XIXe siècle, Pietracorbara connaît la plus importante poussée démographique de son histoire (946 habitants en 1891). Il n’y a pas de travail pour tout le monde. S’accélère alors la migration vers les Amériques. En 1871 on dénombre neuf Corbarais installés à Porto Rico. Les grandes familles du village y ont presque toutes un représentant : Damiani, Dominici, Franceschi, Defendini, Giuliani.
On compte sept palazzi d’Americani à Pietracorbara, de la Marine (le premier « palais » est situé contre la colline du Castellare en face de la plage) à Lapedina (a casa Damiani).
A l’intérieur, ces maisons possèdent un large escalier. Les pièces ne sont pas très grandes mais elles bénéficient d’un confort exceptionnellement élevé par rapport aux standards locaux (salles de bain, eau courante ou source captée, bassin etc…). Des peintures murales ou au plafond ornent les pièces nobles. Ces « palais » sont inspirés par l’architecture néoclassique toscane. Le jardin autour de la maison est une idée neuve ramenée d’Amérique. Ainsi naît, dans cette Corse rurale, laborieuse et pauvre de l’entre-deux-siècles, une manifestation du luxe et de la réussite. Une représentation positive de l’ailleurs qui va accélérer l’émigration vers le continent français.